L’art. Utile ?

On peut dire que pour mon premier article, le sujet choisi n’est pas le plus aisé, ni le plus consensuel. Loin de là. Pourtant, la question de l’utilité de l’art a souvent été posée, à bien des époques et par bien des gens, qu’ils soient connus ou non, initiés ou non. Mais avant de me lancer pleinement, il serait bon de préciser une ou deux choses. Tout d’abord, posons en préambule que je ne suis pas historienne de l’art et que mes élucubrations ne sauraient se substituer à l’avis d’un expert, il semble important de le souligner. Je n’ai pour seule “expertise” que ma pratique de la peinture, du dessin et quelques notions d’histoire de l’art glanées au fil de mes années d’études. De ce fait, tous les articles que je prévois d’écrire, dont celui-ci, n’ont pas pour vocations d’établir des vérités universelles ou de revendiquer une quelconque autorité. J’aime écrire tout simplement. Ensuite, et comme beaucoup d’autres, je m’interroge en permanence sur des sujets divers et variés qui alimentent mon travail. Des interrogations qui peuvent aller puiser dans la recherche purement esthétique, dans l’histoire ou dans les crises actuelles tout en passant par les nouvelles technologies ou encore les relations humaines. Le champ des inspirations est vaste et je vous livre dans ce blog ma vision toute personnelle des choses, sans prétention aucune. Enfin, je ne parle pas dans cet article des artisans d’art dont le travail peut tout à la fois être artistique et utile comme les céramistes, ébénistes ou autre. Alors… Commençons ?

  1. L’art, un passe temps ?
  2. L’art, un marqueur de temps ?
  3. L’art, une porte ouverte ?
  4. L’art, un paradoxe ?
  5. L’art, un cas anormal ?
  6. L’art, un électron libre ?
  7. L’art, une lubie persistante ?

L’art, un passe temps ?

Dans l’inconscient collectif, l’art est quelque chose que l’on associe presque automatiquement aux enfants. Probablement parce que nous avons tous eu durant notre scolarité des cours de dessin ou d’expression artistique censés éveiller notre créativité. Ces balbutiements ne sont pas une mauvaise chose en soi, je pense même que c’est tout l’inverse, mais force est de constater que l’idée reçue citée plus haut, qui en découle, est tenace et altère la perception que l’on a, de prime abord, de l’art en général. Après tout, si certains se remémorent des crayons de couleurs mâchouillés, de la gouache barbouillée au doigt et des lignes à ne pas dépasser, difficile alors de prendre au sérieux ceux qui auront persévéré dans ce domaine. C’est une façon volontairement caricaturale de voir les choses, bien évidemment, mais je pense que ça joue un rôle dans notre perception de l’art donc comment en vouloir à ceux qui le considèrent ainsi ? Ici, la question de l’utilité de l’art n’est valide que si elle est cantonnée à une application très limitée et toute particulière : l’apprentissage. Avec le coloriage on peut dessiner ou peindre dans la perspective d’apprendre à distinguer les formes, les animaux, les couleurs… mais tout cela n’est tout simplement pas considéré, la plupart du temps, comme une vocation éventuelle. Une fois ce premier a priori passé, vient le second lorsque quelques individus farfelus persistent en se lançant dans des études d’arts. Probablement parce qu’ils n’avaient pas d’autres ambitions (comprenez par là qu’ils sont fainéants) ou avaient échoués à poursuivre de “vraies” études… vous l’aurez sans doute deviné, j’évoque ici les deux commentaires que tout étudiant en art aura entendu au moins une fois dans sa vie. Dès que l’art cherche à se vendre il n’est pas “sérieux” et nous y reviendrons plus loin. A l’heure de la mondialisation, du libéralisme, de la course aux nouvelles technologies et du réchauffement climatique, l’art semble être une perte de temps (et donc d’argent). Bien sûr, je ne suis pas d’accord avec ce que je viens d’écrire mais ces a priori sont ancrés dans notre société. La grande majorité des artistes traditionnels (les artistes numériques feront l’objet d’un autre article), quel que soit leur mode d’expression, sont quantité négligeable dans le sens où ils ne participent pas directement à l’effort de production de richesse brute, bien terre-à-terre et avec un véritable but. Quant à la minorité des “artistes à succès”, elle évolue dans des sphères diamétralement opposées et qui dépassent parfois notre entendement, mais là aussi nous y reviendrons un peu plus loin. Pour être claire, l’art n’est pas vital comme l’eau ou la nourriture. L’art perd toute sa valeur (et donc son principal intérêt pour beaucoup) s’il est produit en masse. L’art n’est pas un gros employeur à travers le monde et son marché est finalement assez restreint. Bref, l’art ne coche pas les bonnes cases pour être pris au sérieux. Et comble du pire, il n’a pas de fin en soi à part lui-même. La plupart des choses que nous achetons et consommons ont bel et bien une application concrète en répondant à un besoin. L’art, lui, ne comble aucun impératif biologique, logistique ou matériel. Son seul attrait est l’esthétique, le beau. Une notion trop souvent abordée de manière subjective ce qui la rend in fine indéfinissable. A cela se rajoute en plus la direction prise par l’art contemporain qui, désireux de casser les codes et dépasser les limites de l’art dit classique, prend des chemins tortueux. Ne voyez dans tout cela aucun jugement de valeur de ma part, juste une réflexion toute personnelle. Confusément, dans l’inconscient collectif nous nous retrouvons donc parfois avec une activité pour enfant, ou pour oisif incapable de s’intégrer à l’économie de marché. Je grossis le trait à grand coup de clichés, vous l’aurez compris, mais l’art est néanmoins plus souvent vu comme un passe-temps un peu élitiste qu’un métier en bonne et due forme. Mais le temps, justement. Parlons-en.

L’art, un marqueur de temps ?

Peu de choses sont aussi anciennes que l’art. Si l’on considère l’art pariétal comme sa première apparition dans l’histoire, alors oui, on peut dire que ce “passe-temps” remonte assez loin dans notre passé. A ce titre, on pourrait lui attribuer une toute nouvelle utilité, certes toute aussi restreinte que l’apprentissage ou le décoratif, mais cette fois ci un peu plus intéressante. Le témoignage. Souvent, les artistes sont inspirés par les problématiques de leurs contemporains qu’ils retranscrivent alors instinctivement dans leur travail, devenant ainsi les témoins, volontaires ou non, de leurs époques. Et oui, je pense que mêmes les artistes abstraits témoignent de leur époque. L’absence de figuration est, après tout, un choix délibéré qui traduit lui aussi quelque chose. Mais concentrons-nous sur l’art pariétal. Ces peintures ou gravures incrustées dans la roche nous apprennent des choses qu’on aurait eu bien du mal à découvrir autrement. Nous savions que les hommes de cette époque utilisaient des outils pour chasser mais pas quels animaux ils affrontaient exactement. Certaines peintures sont assez détaillées pour nous donner l’espèce concernée. D’autres ne mettent en scène que des hordes d’animaux, sans la présence de l’homme, ou bien des symboles et des figures sur lesquelles je ne vais pas m’attarder. Laissons aux archéologues le soin de démêler tout cela. Ce qui est intéressant, c’est la raison de la présence de ces peintures au fond des grottes de certaines contrées. On peut envisager une utilité assez proche de celle évoquée plus tôt pour nos propres enfants : l’apprentissage. Quoi de mieux pour un futur chasseur que de se familiariser avec la méthode de chasse ou l’animal chassé en image ? Mais, même si la possibilité me semble valide, je ne m’avancerai pas là-dessus. Ces peintures peuvent également être la simple envie d’un homme (ou d’une femme) d’embellir un site. Ou la trace d’un rite quelconque. Après tout, ces peintures avaient peut-être un but qui nous échappe mais ce qui est sûr, c’est qu’elles sont le témoignage d’une époque lointaine. Qu’elles commémorent un exploit particulier, un rite passé, ou juste un souvenir confié à la pierre, elles ont acquis, pour nous aujourd’hui, une valeur inestimable. Dans ce cas de figure alors oui, l’art peut être l’écho d’une voix depuis longtemps disparue et ce faisant, être utile aux générations futures. L’art est une porte vers notre passé. Et en parlant de porte…

L’art, une porte ouverte ?

Aujourd’hui, les nouvelles technologies, et en premier lieu internet, nous permettent de voyager sans réellement avoir à nous déplacer en personne. Nous avons tous vu des lieux qui nous sont inconnus, distants de plusieurs milliers de kilomètres, via des photos ou des vidéos diffusées sur le web. Avant l’apparition de la toile numérique, l’art jouait ce rôle. Les peintres, qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs, donnaient à voir aux gens des endroits qu’ils n’avaient jamais visités ou dans lesquels ils ne vivraient jamais. Ils faisaient voyager, à travers leurs propres toiles, des hommes et des femmes qui n’avaient pas les moyens de le faire eux-mêmes. L’art, sous toutes ses formes, est une ouverture sur le reste du monde, un moyen de voir et de ressentir ce que nous ne connaissons pas. Quant à ce que nous connaissons déjà, la vision toute personnelle d’un ou d’une artiste est l’occasion de le redécouvrir sous un nouveau jour, d’une manière qui nous frappe et nous touche parce qu’elle résonne en nous. Car au-delà de la perception que nous en avons grâce à nos sens, l’art véritable s’adresse tout particulièrement au cœur. Prenons un exemple. Je ne connais pas l’émotion exacte qui a conduit Munch à peindre Le cri mais lorsque j’ai vu cette peinture pour la première fois, l’angoisse, le désespoir et l’impuissance du personnage m’ont assailli de la même manière qu’un cri aurait déchiré mes tympans. Cette toile m’a poursuivie. Je connaissais déjà les émotions précédemment évoquées, mais cette peinture m’a fait ressentir une version bien plus sombre, bien plus intense et pourtant, paradoxalement, bien plus illusoire tout à la fois : cela restait une peinture et personne ne criait vraiment. Cette toile est-elle pire que mes propres angoisses ? Est-ce que ce personnage est effrayé par ce qu’il voit ou par ce qu’il ressent ? Lequel de ces deux cas serait le pire ? Et si c’était les deux ? A chacun son ressenti. Là où je veux en venir, c’est que les questions peuvent pleuvoir facilement lorsque l’art nous interpelle. Ce qu’il y a d’intéressant, au risque d’en froisser certains, ce n’est pas seulement la peinture seule mais plutôt ce qu’elle peut aussi nous apprendre sur le monde ou sur nous-même. Les introspections qu’elle peut faire naître en nous sont toutes aussi précieuses que le coup de pinceau de l’artiste. Et c’est peut-être ça, le vrai génie de l’artiste, quel que soit son domaine de prédilection. Pour moi, l’art c’est le beau, l’harmonieux. Et quoi de plus harmonieux que de parvenir à toucher émotionnellement quelqu’un grâce à une image fixe, un son et lumière, une danse ou que sais-je encore ? Si l’art nous permet de voir et ressentir ce que nous n’aurions jamais imaginé, ce que nous n’aurions jamais ressenti ou bien de nous faire voir et ressentir différemment ce que nous connaissions déjà, est-il utile ? Je serai tentée de répondre oui mais mon avis n’engage que moi. De plus, nous savons tous à quel point l’art peut être controversé. Et justement…

L’art, un paradoxe ?

Combien d’entre nous ont entendu les sommes astronomiques que certaines œuvres (contemporaines ou non) atteignent de nos jours ? La majorité je pense. Difficile d’ignorer le sujet lorsqu’il fait les gros titres des journaux, qu’ils soient télévisés ou papiers. Et c’est d’ailleurs souvent par ce biais, très peu représentatif du monde de l’art dans son ensemble, que bien des gens jugent l’art dispendieux et, au final, inutile. Comment leur en vouloir ? Entendre des sommes à sept ou huit chiffres pour des œuvres souvent controversées (je fais référence ici à des œuvres contemporaines et non classiques de grands maîtres) reste incompréhensible pour beaucoup de personnes. Cela peut décontenancer mais voilà, cette facette de l’art justement est très marginale. Très peu d’artistes vendent leurs œuvres à de telles sommes et ils deviennent eux-mêmes prisonniers, in fine, d’un marché de dupe. Car quand votre côte atteint des sommets et qu’une poignée de gens seulement dans le monde est encore capable de vous acheter, vous devenez indiscutablement dépendant de ces personnes. Et si cette même poignée de gens a une vision bien précise de l’art alors elle fait la pluie et le beau temps, de par sa puissance financière, sur ce qui devrait être considéré comme beau ou non. On en arrive à une situation quelque peu absurde. Le beau, en tant que concept, est une notion plus universelle qu’individuelle. Ce n’est pas seulement un goût personnel mais également un concept rattaché à l’ensemble de l’humanité. Le beau surpasse l’individu dans le sens où ce qui est reconnu comme véritablement beau sera, en toute logique, admis par tant de gens que la notion même de beau finira par dépasser tous ces gens pour devenir une sorte de vérité universelle. Je ne sais pas si je suis très claire mais c’est ainsi que je perçois la notion de beau, cependant on se rapproche de plus en plus de la philosophie ici donc passons. Tout ça pour dire que oui, lorsque nous sommes confrontés à cette facette de l’art (celle des gros chiffres), il y a de quoi être perplexe pour certains, sachant en plus que c’est cette facette qui retient le plus notre attention. Pourtant des milliers d’artistes, du plus modeste au plus fantasque, qui de leur côté participent tout autant au monde de l’art, vivront quant à eux de façon bien plus précaire. Je ne citerai pas Van Gogh ici, mais c’est l’idée. Voilà une autre chose curieuse. De son vivant un artiste peut être ignoré, voire devenir la risée de ses contemporains pour ensuite, après sa mort, faire l’objet d’un plébiscite. Paradoxal, non ? Sans parler de l’art en lui-même, si l’on considère que payer un artiste est, si ce n’est utile, ne serait-ce que nécessaire pour qu’il puisse vivre, quelle serait sa juste rémunération ? Difficile à dire. Notamment à cause des innombrables sensibilités qui composent nos sociétés. Après tout, sans parler de Picasso lui-même, Guernica est un chef-d’œuvre pour certains et une horreur pour d’autres. Je fais un raccourci pour gagner du temps, certes, et je ne prendrai pas partie pour l’une ou l’autre de ces positions mais le fait est qu’elles existent. Comment définir un prix juste lorsque l’objet de notre jugement est potentiellement si clivant ? L’art ne se mange pas, il ne se boit pas, il n’est pas vital alors pourquoi payer pour y avoir accès ? De façon extrêmement terre-à-terre, on pourrait se le demander. Pourtant il existe bel et bien des gens tout à fait passionnés par l’art qui seraient offusqués d’entendre une telle question. Pourquoi ? Est-ce que l’art serait, depuis ses premières apparitions, la manifestation d’un besoin intangible ? Une envie d’esthétique peut-être ? Une quête de liberté ? Autre chose ? Et si l’art était l’incarnation physique de nos propres paradoxes ?

L’art, un cas anormal ?

Nous évoquions un ou deux paradoxes plus haut mais en vérité il en est un autre qui me vient à l’esprit : travailler dans le domaine de l’art a quelque chose de prestigieux alors même qu’un artiste peintre, un photographe, un sculpteur (et j’en passe) auront souvent été découragés, à tort ou à raison, de persévérer dans cette voie. Pourquoi ? Parce que “ce n’est pas avec ça que tu vas gagner ta vie”. Etonnant, non ? Lorsqu’on est en début de carrière, rares sont les encouragements mais lorsque vous êtes établi, ou même reconnu, à ce moment-là vous devenez quelqu’un de respecté. Peut-être parce que ce ne sont là pas des métiers “sérieux” comme évoqué en début d’article. J’imagine qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil… mais je digresse. Cela m’évoque toutefois une autre mécanique de la pensée humaine qui est particulièrement intéressante, du moins, de mon point de vue. Lorsque quelque chose sort de l’ordinaire, alors cette même chose est, au premier abord, considérée comme suspecte. Et si pour ne rien arranger elle est nimbée de mystère, en plus d’être percluse de préjugés ? D’autant plus suspecte. L’art, pas tout à fait normal donc suspect ? Et si c’était pour cette raison, peut-être, qu’on en parle autant ici et ailleurs ? L’art, à tous les niveaux, a ses défenseurs et ses détracteurs, tous ont le droit de s’exprimer et ils méritent tous d’être entendus. Car finalement, tout ce qui découle de leur expression pourrait bien être utile. L’art les interpelle. Leurs réactions, positives ou non, nous interpellent tout autant. On n’a jamais autant parlé de l’art dans son ensemble que maintenant. On discute, on échange, on s’invective aussi parfois. Est-ce utile ? A mon humble avis, ce dialogue-là est tout aussi précieux que celui, silencieux, qui nous pousse à l’introspection. On échange des idées, des concepts, des opinions avec tout un chacun et ça, je pense que c’est utile. On ne sera pas toujours d’accord. On n’aura pas toujours les mêmes idées ou la même lecture d’une œuvre. On n’aura pas non plus les mêmes ressentis ou le même affect vis-à-vis de tel ou tel artiste mais… c’est ce qu’il y a de magique non, dans tout ça ? Je m’explique. Discutez avec qui vous voudrez d’un domaine scientifique, d’une maladie spécifique ou d’une prouesse technologique. Très vite, le vocabulaire technique pourrait venir à manquer, sans compter les connaissances nécessaires à une véritable discussion sur ces sujets. L’art a ceci de particulier qu’au-delà de la technique pure, qui demande une certaine expertise pour être analysée, tout le monde peut en parler puisque, par essence, l’art s’adresse précisément à ce tout le monde. Il ne vise personne en particulier mais le grand public en général dans sa définition la plus large, de l’expert reconnu au néophyte le plus total. Pas étonnant, alors, de voir une myriade de réactions, qui font elle-même réagir, sur lesquelles on débat, élicitant d’autres réactions, et ainsi de suite jusqu’à ce qu’on s’aperçoive que, au bout du bout, il n’y aura jamais assez de mots pour mettre d’accord l’humanité. Et c’est tant mieux car nos différences ne sont pas un problème. Ce qui importe au final, c’est l’échange. Alors… l’art est-il utile ?

L’art, un électron libre ?

Chercher les limites, les dépasser, les tordre, les questionner sont autant de buts que l’art s’est fixés, que ce soit hier ou aujourd’hui. Pas systématiquement, bien sûr, mais parfois les artistes ressentent le besoin d’interroger leur époque et, par ricochet, invitent leurs contemporains à se prêter à ce même exercice. L’art peut surprendre. Il peut choquer. Il peut toucher. Il peut dénoncer. Il peut inventer. Il peut aussi échouer. Peu de domaines dans nos sociétés sont aussi libres que l’art. C’est à la fois sa force et sa faiblesse. Une force créatrice, qui tend à inspirer ou à évader celui ou celle qui la contemple. Une faiblesse destructrice, qui peut bousculer ou choquer au point de compromettre nos idées, nos vérités ou nos acquis. Cette liberté de ton qui est au cœur de l’art est un idéal pour bien des hommes (et des femmes) à travers le monde. Qui refuserait d’être libre ? C’est aussi cette facette qui nous attire comme un aimant et qui rend parfois la critique si dure à son encontre car être libre est certes un droit universel mais surtout une aspiration de l’humanité toute entière donc nous y sommes tous particulièrement sensibles. Choquer, ouvrir les yeux sur ce qu’on ne veut pas voir, dénoncer tout et son contraire, briser les codes… tout ça n’est pas donné à tout le monde. L’art est libre de tout. Ou presque, heureusement que la morale impose encore quelques garde-fou parce que des fous, il y en a. Mais l’art est surtout et avant tout libre de créer. Les hommes pensent, oui, mais ils créent aussi. Il est bon de voir de la création lorsque nous sommes entourés par la destruction. Il n’y a pas de message caché dans ce texte, je ne fais référence à aucun évènement particulier mais plutôt à un climat ambiant généralisé. La création a quelque chose de fascinant, quelle soit d’origine humaine ou divine, et le fait que l’art en soit l’un des vecteurs privilégiés contribue peut-être à sa popularité. Parce que qu’il le veuille ou non, l’homme a besoin de créer. Des choses utiles en premier lieu, qui répondent à des besoins vitaux que l’on ne peut ignorer (habitat, sommeil, nourriture et tout ce qui peut en découler). Des choses moins utiles ensuite, qui ne sont pas indispensables à notre survie mais qui contribuent à faire vivre nos sociétés et l’économie (toutes ces choses petites ou grandes qui nous facilitent la vie au quotidien par exemple, la roue ou un téléphone). Des choses inutiles enfin, qui sont totalement dispensables en tous points puisque nous pouvons très bien vivre sans et qui pourtant participent à notre bonheur (les arts et la culture notamment). Si nous pouvons vivre sans alors pourquoi l’art, via une ou plusieurs des disciplines qui le composent, est-il présent dans toutes les sociétés ?

L’art, une lubie persistante ?

J’en viens, enfin me direz-vous, à la dernière réflexion de cet article. L’art ne date pas d’hier. Si l’on admet qu’il a traversé des siècles (ou plutôt des millénaires ?) de notre histoire, nous pourrions donc imaginer qu’il répond à un besoin, quel qu’il soit, de l’être humain. Car ne dit-on pas que les choses inutiles sont vouées à disparaître ? L’art est une donnée constante de nos sociétés. Alors oui, il possède plus ou moins d’importance selon les époques ou les pays, mais le fait est qu’il est et qu’il demeure. Il n’est certes pas vital, pas nécessaire non plus, absolument pas obligatoire et pourtant… à quoi ressembleraient nos vies, nos villes, nos habits, nos maisons ou nos bâtiments sans art ? L’art s’infuse dans une multitude de strates de notre quotidien, à tel point qu’on a vite fait de l’oublier. L’art n’est pas seulement la peinture ou la sculpture mais aussi le design, l’architecture, la musique, le cinéma, la littérature, le théâtre, la mode, la joaillerie… Bref, la création ? Toutes ces disciplines sont à l’art ce que les couleurs sont à la peinture ou ce que les notes sont à la musique. Je pourrais filer la métaphore pour chacune de ces disciplines mais je vais nous épargner ça. Nous le percevons grâce à nos sens et pourtant l’art ne s’adresse pas qu’à notre corps. La mode, pour ne citer qu’elle, n’est pas obligée de faire du beau car la fonction première d’un vêtement est de nous couvrir, que ce soit par pudeur ou par impératif de survie (température). Allons bon ! Si tel est le cas alors pourquoi diable recherche-t-on le beau dans nos vêtements ? Pour la même raison que nous contemplons un coucher de soleil ou une aurore boréale. Pour la même raison qui nous pousse à admirer un bâtiment ou un tableau. Pour la même raison qu’un film, une musique ou une chanson peut nous émouvoir aux larmes. Le beau nous plait. Il vibre en nous et nous interpelle. Il s’adresse à tout notre être. Le corps a ses sensations. L’esprit a ses sensibilités. Le cœur a ses sentiments. Le beau s’adresse aux trois. Il flatte nos yeux ou nos oreilles, il défie notre intellect et il exacerbe nos émotions. Peut-être que la raison pour laquelle nous aimons instinctivement et autant le beau tient en cette simple idée : il nous rend plus conscient du moment présent. Pour résumer, si l’art était inutile il aurait disparu depuis bien longtemps mais puisqu’il est constant, voire même de plus en plus présent, il n’est pas impossible qu’il réponde à un besoin viscéral de l’être humain, ce qui en ferait, par voie de fait, quelque chose de tout à fait utile. Cependant utile à quoi exactement ? Quel besoin ais-je de l’art ? La réponse à cette question est probablement différente pour chacun d’entre nous. A chacun sa vérité. Pour ma part, si l’art n’existait pas, s’il ne faisait plus partie de ma vie, je sais tout ce que j’y perdrais. Cependant tout ça devient très philosophique et ce n’est pas vraiment le but de ce blog donc je vais m’en tenir là pour le premier article qui est déjà, ma foi, beaucoup trop long.

Merci de l’avoir lu jusqu’au bout ! N’hésitez pas à partager cette page si le sujet vous a plu. Quant à moi, je vous dis à bientôt pour le prochain article !

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